Technologies quantiques : un tournant numérique majeur à ne pas manquer pour la France ?

Technologies quantiques : un tournant numérique majeur à ne pas manquer pour la France ?

Pouvons-nous démultiplier nos capacités de calcul ? Nos protocoles de chiffrement seront-ils tous rendus obsolètes du jour au lendemain ? Les technologies quantiques sont-elles le futur de l’informatique ? Voilà entre autres quelques questions auxquelles je tâcherai de répondre dans le cadre de la mission que m’a confié le Premier ministre pour projeter la France dans cette nouvelle révolution !

 

Le quantique : une bataille technologique mondiale

 « Environ 99 % du chiffrement en ligne est vulnérable aux ordinateurs quantiques ». C’est ce qu’a déclaré le 21 mars dernier, lors de la conférence Inside Quantum Technology (IQT), Mark Jackson, responsable scientifique de Cambridge Quantum Computing[1]. Les ordinateurs quantiques, grâce aux principes d’intrication quantique et de superposition pour représenter l’information, sont capables d’effectuer plus rapidement certains types de calcul dans des ordres de grandeur que les ordinateurs classiques ne permettent pas. Aujourd’hui, cette technologie en est encore à ses balbutiements, mais son développement peut aller très vite, et les enjeux en termes de capacité à innover et de souveraineté sont majeurs. Après l’intelligence artificielle, il est certain que l’informatique quantique signera la naissance d’une nouvelle ère du numérique.

Face à ces bouleversements, la France ne doit pas manquer l’occasion d’être un des leaders mondiaux sur les technologies quantiques, face à la Chine et les Etats-Unis qui réalisent des investissements conséquents sur ce secteur.

La France n’est pas en retard sur le sujet mais s’interroge sur l’opportunité de passer à l’étape supérieure. Nous disposons d’ores et déjà d’une excellence du monde de la recherche en la matière, mais aussi dans le domaine industriel, où des entreprises françaises se distinguent.

C’est dans cet objectif, que le Premier ministre, Edouard Philippe, a lancé le 5 avril 2019 une mission temporaire de quatre mois pour concevoir la stratégie française en matière de technologies quantiques.

Dans la lettre de mission qu’il m’a adressé , l’objectif est clair : ne pas rater ce prochain grand virage technologique !

 

Quelques notions clés sur les technologies quantiques[2]

  • Dès les années 1990, plusieurs théoriciens démontrent que certains calculs verraient leur résolution accélérée dans des proportions inouïes s’il était possible de les implémenter sur des bits quantiques, aussi appelés qubits, plutôt que sur des bits classiques. À condition, bien sûr, de disposer d’un processeur quantique pour les utiliser, processeur dont personne ne sait à l’époque à quoi il pourrait ressembler.
  • Le bit quantique ou qubit est l’unité élémentaire pouvant porter une information quantique. Comme le 1 et le 0 sont les deux états d’un bit classique ordinaire, un qubit est la superposition cohérente d’au moins deux états de base quantiques, que l’on peut noter |0> et |1>. Le qubit a donc la caractéristique, en rupture avec les bases de l’informatique telle que nous la connaissons aujourd’hui, d’être non 0 ou 1, mais, en même temps 0 et 1.
  • ​​​Au XXe siècle, la mise au jour de la physique quantique a déjà révolutionné notre conception du monde mais aussi notre mode de vie avec ses premières applications : lasers, transistors, circuits intégrés.

 

Organisation et calendrier de la mission

Dans le cadre de cette mission, je serai notamment accompagnée par Iordanis Kerenidis (chercheur) et Jean-Paul Herteman (ex-PDG de Safran).

Pour mener à bien cette mission, nous pourrons nous appuyer sur la direction générale des entreprises, la direction générale de la recherche et de l’innovation, la direction générale de l’armement et de l’agence nationale de la sécurité des systèmes d’informations.

Des auditions démarreront dès la mi-avril, et ce jusqu’à mi-mai.

La mission doit s’achever sous quatre mois. Un rapport sera donc rendu au Premier ministre d’ici à septembre.

 

Comment les travaux vont être menés

Les travaux doivent déboucher en un rapport d’analyse et de recommandations, menées en concertation avec les parties prenantes publiques et privées de l’écosystème français et international (recherche, filières technologies, investisseurs, etc.), et en lien avec les travaux nationaux, réalisés par le comité institutionnel des technologies quantiques, et européens.

Les technologies quantiques se développent, de nos jours, majoritairement dans trois secteurs: l’algorithme ou calcul quantique, les communications et l’industrie des capteurs.

Les résultats attendus sont :

  • Sur le plan du calcul quantique : une analyse de l’avantage stratégique pour un pays de disposer d’un ordinateur quantique et d’en maîtriser la technologie ; une vision d’anticipation des progrès technologiques à venir à court/moyen terme ; ou encore une vision des usages permis ou facilités par ces progrès technologiques.
    Exemple : le calcul quantique permet de démultiplier et d’accélérer les calculs réalisés aujourd’hui avec les ordinateurs classiques.
  • Sur le plan de la sécurité des communications : un avis sur la pertinence économique et en matière de souveraineté de développer des technologies de cryptographie quantiques ou, le cas échéant, de proposer des technologies alternatives.
    Exemple : Un exemple important de cryptographie quantique est la distribution quantique de clés, qui permet de distribuer une clé de chiffrement secrète entre deux interlocuteurs distants, tout en assurant la sécurité de la transmission grâce aux lois de la physique quantique et de la théorie de l’information. Cette clé secrète peut ensuite être utilisée dans un algorithme de chiffrement symétrique, afin de chiffrer et déchiffrer des données confidentielles.
  • Sur le plan des capteurs : une analyse du potentiel des technologies quantiques actuelles ou susceptibles d’être industrialisées à court terme, ainsi que les verrous technologiques à lever pour permettre ces usages.
    Exemple : horloges atomiques, accéléromètres, gyromètres ou gravimètre fondés sur l’interférométrie atomique, magnétomètres sensibles et compacts à base d’atomes naturels ou artificiels.

 


[1] https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-le-doe-construit-le-supercalculateur-le-plus-rapide-avec-intel-et-cray-74715.html

[2]  http://www.cea.fr/comprendre/pages/nouvelles-technologies/essentiel-sur-ordinateur-quantique.aspx

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