La “Paris Digital Week” pour recréer la confiance dans le numérique
La France a accueilli la « Paris Digital Week », premier rendez-vous numérique d’un tel niveau international de son histoire. Concrètement, il s’agit de plusieurs rendez-vous internationaux sur le numérique. Chefs d’États et de gouvernement, ambassadeurs, parlementaires, élus locaux, entreprises, membres de la société civile, communauté technique et citoyens du monde entier se sont réunis à Paris lors de 3 moments forts pour réfléchir et proposer des solutions aux grands enjeux de notre génération.
Le Forum de Paris sur la Paix:
Inspiré par l’esprit de la COP 21, le Forum de Paris sur la Paix a vocation à devenir le rendez-vous annuel de la gouvernance mondiale en incluant la question des espaces numériques. Plus de 10 000 visiteurs, 65 chefs d’Etat et de gouvernement ainsi que 10 dirigeants d’organisations internationales se sont réunis durant trois jours à La Grande Halle de La Villette pour la première édition de cet évènement. Le Forum de Paris sur la Paix repose sur l’idée selon laquelle la coopération internationale est essentielle pour relever les défis mondiaux et assurer une paix durable. Ce forum s’est démarqué par l’originalité de son format : de nombreux débats ont eu lieu ainsi que des tables rondes et master class organisés par des chefs d’Etat.
Ce moment a démontré qu’il existe une réelle opportunité pour un multilatéralisme puissant et pour une meilleure organisation du monde. Le forum a aussi mis l’accent sur la chance que représentent les solutions technologiques pour maintenir la paix : plus de 150 projets concrets ont été présentés, un hackathon (marathon de développement informatique) a eu lieu autour des questions de transparence budgétaire. Si la technologie est souvent pointée du doigt comme constitutive d’un risque pour nos sociétés, ce forum a choisi de démontré que le numérique pouvait, et devait, avant tout être un acteur du maintien de la paix.
Il s’agit du tout premier sommet international consacré exclusivement à la question de la transformation numérique des États et les interactions entre numérique et démocratie. Ce sommet a rassemblé innovateurs et décideurs européens, investisseurs et universitaires, gouvernements et collectivités locales, ainsi que membres de la société civile, pour imaginer le gouvernement numérique de demain. La question principale de ce sommet était : quel soutien faut-il mettre en place pour favoriser et encourager l’émergence d’un écosystème d’innovateurs démocratiques européens ? L’objectif est d’améliorer l’utilisation des nouvelles technologies dans le secteur public et la collaboration entre États et entreprises. Si le numérique n’a pas vocation à remplacer la démocratie physique, il constitue une formidable opportunité de dialogue plus constant entre élus et représentants, c’est tout l’enjeu présenté par les GovTech.
Pour ma part, j’ai participé à une table ronde sur les Civic Techs pour défendre l’idée que l’utilisation d’outils numériques civiques par les pouvoirs publics doit être maitrisée. Il ne faut pas tomber dans le même écueil que celui qu’ont pu connaitre les réseaux sociaux. C’est pourquoi, il est essentiel que les outils de démocratie numérique soient basés sur du logiciel libre – c’est-à-dire que l’on puisse accéder à la structure informatique de l’outil – pour plus de transparence et collaboration. En effet, il est primordial de savoir comment fonctionne un algorithme qui a vocation à donner un avis politique pour que les résultats ne soient pas biaisés : comment être sûr qu’un vote d’une personne vaut autant qu’une autre ? Il faut pour cela accéder au code du logiciel et pouvoir vérifier sa fiabilité.
Mais ce n’est pas tout, en plus d’être transparents, ces outils doivent se plier à des exigences de protection des donnés personnelles. La protection des données personnelles, c’est le droit reconnu à chacun d’avoir la maîtrise des contenus que l’on poste en ligne ou des traces que l’on y laisse. Pour les outils de démocratie, cette exigence de maîtrise est encore plus grande ! Faisons un parallèle très simple, aujourd’hui, il est impensable que l’on supprime les isoloirs en France pour aller voter, c’est la même chose lorsque notre avis est collecté en ligne, nos opinions et idées politiques doivent être anonymisées pour continuer à respecter cette liberté de penser.
Le Forum Mondial de la Gouvernance de l’Internet
Pour la première fois depuis la création du IGF, la France accueille ce sommet – émanation de l’ONU – qui a pour but de rassembler tous les parties prenantes – gouvernement, chercheurs, communauté technique, entreprises et société civile – pour reconstruire une gouvernance de l’Internet qui permette d’allier innovation et protection des droits et libertés des utilisateurs.
Le Président de la République a ouvert ce Forum avec un discours fondateur sur la vision française – et européenne – de l’Internet. Premier discours fort du Président de la République qui a détaillé la feuille de route numérique de la France en proposant une troisième voie face à celles proposées aujourd’hui par le modèle californien et le modèle chinois. Le premier est un modèle du numérique conduit essentiellement par des acteurs privés où eux-mêmes se fixent leurs propres règles de régulation, tandis que le second, le chinois, diamétralement opposé, est entièrement surveillé par l’État.
Face à cela, le Président de la République a réitéré l’engagement de la France sur des questions essentielles pour un numérique plus libre et respectueux : le respect de la neutralité du net, la protection des données personnelles et la nécessité d’une gouvernance multipartite de ce bien commun de l’Humanité. Il a appelé à créer un véritable droit international du numérique, nouveau terrain de guerre entre les pays. Il a ainsi invité tous les acteurs du secteur – États, entreprises, associations, chercheurs – à proposer une régulation du numérique plus collégiale, contrairement à l’actuelle où chaque pays a une législation différente et souvent peu performante.
Le Président de la République a par ailleurs appelé à mener une bataille conjointe contre le terrorisme, la haine et la discrimination dans l’espace numérique. Il s’agit d’une question hautement sensible car cela demande une action des plateformes pour supprimer du contenu et pose donc la question de la liberté d’expression. Afin de trouver une bonne méthode et associer les régulateurs français, Emmanuel Macron a annoncé le lancement d’une expérimentation unique au monde entre le gouvernement français et Facebook où des régulateurs français et des chercheurs se rendront pendant 6 mois dans leurs locaux pour observer leur fonctionnement interne et accéder à leur système d’information.
Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace :
Emmanuel Macron a annoncé le lancement de ” l’Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace “, signé par 51 Etats, 93 acteurs de la société civile et 218 partenaires du secteur privé.
L’Appel de Paris est une déclaration de haut niveau en faveur de l’élaboration de principes communs de sécurisation du cyberespace.
Les cyberattaques sont perçues comme le principal facteur de risque commercial pour les entreprises. Le cyberespace est désormais un espace géopolitique comme les autres où les différents acteurs, des particuliers, des groupes organisés et parfois des États peuvent s’attaquer à des systèmes informatiques pour nuire.
Ce texte est la première déclaration engageant les États, organisations internationales, ONG et entreprises, municipalités et acteurs locaux à travailler ensemble en vue :
- d’accroître la prévention et la résilience face aux activités malicieuses
- de protéger l’accessibilité et l’intégrité d’internet
- de coopérer afin de prévenir les interférences aux processus électoraux
- de travailler ensemble contre les violations de la propriété intellectuelle par voie cyber
- de prévenir la prolifération des programmes et techniques cyber malicieux
- d’accroître la sécurité des produits et services numérique ainsi que la « cyber-hygiène »
- de travailler pour renforcer les normes internationales pertinentes
Pour ma part, j’ai activement participé à cette séquence pour défendre mes positions sur les enjeux du numérique. J’ai organisé une table ronde sur la régulation des plateformes pour défendre ma vision d’une régulation ouverte, c’est à dire basée sur la donnée, favorable à l’expérimentation et enrichie avec la participation des utilisateurs. J’ai aussi participé à un panel sur les fausses nouvelles pour insister sur l’importance de la transparence des algorithmes pour lutter efficacement contre la propagation des fake news.