Face aux (r)évolutions du 21e siècle, une politique étrangère de l’audace

Face aux (r)évolutions du 21e siècle, une politique étrangère de l’audace

Du 27 au 30 août, j’ai participé à la 27ème édition Conférence des ambassadeurs organisée par le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Cet évènement réunit tous les ans les diplomates français et hautes autorités de l’Etat pour coordonner l’action extérieure des différents représentants de la France à l’étranger et auprès des organisations internationales. C’est également un moment d’échange qui permet aux ambassadeurs et ambassadrices de se rencontrer et de dialoguer avec des membres du gouvernement, des élus, des entreprises et des représentants de la société civile. Je reviens dans cet article sur le discours du président de la République et sur mon intervention lors de la deuxième journée de rencontre.

Réédifier la souveraineté européenne économique, culturelle et numérique

Le président a identifié plusieurs priorités pour répondre à ces différents enjeux : assumer une position de « puissance d’équilibre » et une diplomatie des biens communs, renforcer le partenariat de la France avec l’Afrique et la zone Méditerranée, renouveler les méthodes et réédifier la souveraineté européenne aussi bien économique que culturelle et numérique. Concernant l’Amérique latine, Emmanuel Macron a rappelé l’engagement de la France dans l’action internationale contre la destruction de l’Amazonie. L’un des grands moments de cette fin d’année en termes de diplomatie environnement sera la COP 2025 organisé à Santiago de Chile. A l’occasion du G7, le président français a fait plusieurs annonces aux côtés du président chilien Sebastián Piñera en matière de protection du climat et de la biodiversité. 

Ce discours d’ouverture riche et engageant m’a profondément marqué, notamment lorsque le président a abordé une problématique nouvelle pour les ambassadeurs et leurs collaborateurs : réinvestir les sujets techniques. Ce constat est particulièrement vrai sur les sujets numériques et concerne bien évidement aussi le reste de l’administration et les élus. C’est d’ailleurs l’une des lignes directrices de mon engagement ! Depuis le début de ma carrière et encore aujourd’hui, je défends la nécessité d’une collaboration entre experts, politique et société civile pour apporter les solutions assurant un espace numérique mondial érigé sur des valeurs de transparence, de collaboration, d’ouverture et d’inventivité.

Quel rôle pour la France dans le renforcement de la sécurité numérique ?

Le lendemain, je suis intervenue à une table-ronde autour du rôle de la France dans le renforcement de la sécurité numérique avec Henri Verdier, ambassadeur du numérique et Guillaume Poupard, directeur général de l’ANSSI. 

Il me semble qu’en matière de cybersécurité, il n’est pas souhaitable d’adopter uniquement des mesures correctives et sécuritaire qui sont inadaptées à certains sujets comme par exemple celui des fausses nouvelles. La sécurité numérique passe aussi par la confiance dans l’écosystème numérique, par la construction d’une architecture de contrepouvoirs pour assurer une souveraineté numérique, une concurrence saine et un espace numérique sûr pour les utilisateurs

Promouvoir l’intelligence collective contre les cyberattaques

La régulation est un point pivot de la sécurité numérique : nous avons besoin d’un cadre moderne, efficace et adapté aux problématiques cyber.  Il me semble urgent de substituer à un modèle reposant sur l’exploitation des données personnelles par des puissances monopolistiques un nouveau paradigme valorisant la transparence, l’ouverture et la collaboration. Les régulateurs doivent se saisir des méthodes de gouvernement ouvert pour inclure les citoyens à la prise de décision, diffuser les pratiques d’open data et responsabiliser davantage les grandes plateformes. Ces pratiques permettront aux régulateurs de donner aux utilisateurs des leviers d’action pour une régulation plus agile et fluide. Si les utilisateurs du numérique sont résilients, alors notre écosystème le sera aussi.

L’Europe doit mettre en place une troisième voie numérique face aux modèles américain et chinois

Cette vision repose sur un citoyen-utilisateur clairement proactif au sein de l’espace numérique et jouissant de nouveaux droits. Cet empowerment des cybercitoyens pourrait passer par exemple par la mise en place d’une Charte numérique assurant notamment un libre accès au web, la neutralité du net, le droit à l’information et l’éducation au numérique ainsi que la protection des données personnelles. Il me semble qu’un tel modèle correspond aux valeurs fondatrices d’Internet et aux objectifs de l’UE. L’Europe doit mettre en place une troisième voie numérique face au modèle américain, centré sur une logique de marché sans contre-pouvoir mise en mouvement par une concurrence exacerbée et au modèle chinois, vision étatiste où règnent la centralisation et la censure.

Agir sur la scène internationale pour construire ensemble le numérique de demain

Cette troisième voie doit s’appuyer sur une forte diplomatie numérique pour être exportée vers des instances internationales existantes comme le Forum pour la Gouvernance d’Internet piloté par l’ONU, le G20 ou l’OCDE et autres pays qui partagent nos valeurs comme l’Amérique latine. Le RGPD est une bonne illustration des avancées possibles sur la scène internationale. Depuis sa mise en oeuvre, l’Europe s’est hissée au rang de modèle en termes de protection des données personnelles. Les voies d’influence sont multiples : mise en place de clauses spécifiques lors de négociations commerciales, partage d’expériences entre Etats, portage au niveau des traités internationaux, mise en place de nouveaux principes généraux du droit international.

Nous avons la responsabilité de nous emparer de ces différents outils pour faire avancer les discussions transnationales sur le numérique.  L’Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace lancé en 2018 par Emmanuel Macron suivi de l’Appel Chrischurch en mai dernier avec la première ministre Néozélandaise Jacinda Arden montrent la marche à suivre pour construire ensemble un Internet plus fiable au service des citoyens.  

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© 2019 Paula Forteza - Députée des Français d'Amérique latine et des Caraïbes