Organisation de la sortie de l’état d’urgence sanitaire: ma position
Le mercredi 17 Juin 2020 je me suis exprimée au nom du groupe “Ecologie Démocratie et Solidarité” sur l’organisation de la sortie de l’état d’urgence sanitaire.
Retrouvez ci-dessous l’ensemble de mon discours:
Le texte qui nous est soumis aujourd’hui à lecture est sensé organiser la fin de l’état d’urgence. Mais ce texte nous fait-il réellement sortir de l’état d’urgence ? Sommes-nous ou ne sommes-nous pas encore en état d’urgence ? À nos yeux rien d’autre qu’un état d’urgence ne justifie de déléguer au gouvernement des décisions à ce point constitutives des libertés fondamentales : la liberté de circuler, la liberté d’entreprendre, la liberté de réunion et de manifestation. Malgré nos interrogations en commission aucune réponse convaincante nous a été apporté. Pourtant nous avons essayé de comprendre votre raisonnement. Nous avons essayé de faire preuve de responsabilité et entendre les besoins complets que le gouvernement nous exposait.
En effet, le risque d’une seconde vague n’est pas à exclure, même aucunes informations scientifiques et épidémiologiques ne nous permettent à ce jour de nous faire un avis tranché. De nouveaux cas en Chine et le reconfinement de quartiers de Pékin doit à cet égard nous alerter. Nous ne fermons pas les yeux. La période estivale qui s’ouvre devant nous peut amener avec elle de nouveaux risques.
Le groupe « Ecologie Démocratie Solidarité » n’était donc pas fermé à trouver des alternatives qui permettent au gouvernement de déclencher certaines mesures d’exceptions le temps de s’assurer de la réussite absolue de la sortie de crise. Au point d’évoquer la piste, par amendement d’appel, d’une prolongation de l’état d’urgence beaucoup plus courte, plus encadrée et plus circonscrite sur les besoins indispensables du moment dans lequel nous nous trouvons.
Ce dispositif avait le mérite d’avoir était codifié, approuvé par le conseil constitutionnel, d’être plus solide en termes de sécurité juridique et de séparation des pouvoirs. Tout était à nos yeux préférable à des mesures restreignant nos libertés fondamentales, prises par voie règlementaire et pour une durée de 4 mois sans aucun autre passage au parlement.
Nous le redisons aujourd’hui haut et fort. Nous sommes contre tout dispositif qui impliquerait une régression de la place des libertés fondamentales dans la hiérarchie des normes. Nous ne pouvons pas accepter de déléguer ces libertés fondamentales au sein du pouvoir règlementaire. Le dispositif, tel que présenté par le gouvernement dans le présent texte, vient retirer du domaine de la loi ces mesures, entrainant à la fois une perte du contrôle du parlement et l’impossibilité pour le parlement de les soumettre au filtre du conseil constitutionnel.
Les mesures introduites dans le texte concernant les droits du parlement ne constituent qu’une information et à aucun contrôle effectif. C’est pour nous une ligne rouge que les travaux en commission n’ont pas permis de lever. Par ailleurs, selon les besoins que vous nous exposez Monsieur le Ministre, nous aimerions avoir des réponses de votre part.
En quoi aujourd’hui les dispositions déjà prévues par le code de la santé, notamment les articles L3131-1 et L3131-13, ne seraient elle pas suffisantes. Le premier prévoit expressément que le Ministre chargé de la santé peut prendre toutes mesure proportionnée afin de prévenir et de limiter les conséquences possibles sur la santé de la population et ce après la fin de l’état d’urgence sanitaire, afin d’assurer la disparition durable de la situation de crise sanitaire. Le second, prévoit lui, que l’état d’urgence sanitaire peut être déclaré par décret en conseil des ministres permettant un retour immédiat à l’état d’urgence si la situation le rend nécessaire. Pourquoi avançons-nous vers un texte hybride, un état d’urgence qui ne dit pas son nom, et qui présente par de nombreux aspects des zones d’ombres qui sont autant de risques juridiques face à nos libertés fondamentales.
Les travaux en commission n’ont malheureusement pas permis de répondre à nos craintes, les aménagements effectués sur le texte sont symboliques. En somme, alors que les annonces présidentielles et l’intitulé de ce présent projet de loi nous invite à sortir de l’état d’urgence sanitaire, le contenu même du texte nous propose d’une façon détournée d’y rester. C’est pour cette raison que les membres du groupe « Ecologie Démocratie Solidarité » voteront contre.